MISE À JOUR : Cet article dans Le Soleil fait une mise à jour du cas de l’îlot St-Michael à Sillery et montre comment le radicalisme des défenseurs joue en défaveur du patrimoine.
Patrimoine religieux
Le patrimoine religieux soulève à nouveau les passions dans le quartier de Sillery près de Québec alors que la fabrique de l’église St Michael veut vendre une partie de sa propriété. Que faire lorsque la défense du patrimoine mène à une guerre de tranchées?
L’ilot St Michael
L’ilot St Michael regroupe l’église, le presbytère, la salle communautaire et les terrains. Le temple anglican, construit en 1854, est le deuxième plus ancien à Québec. La salle paroissiale a été érigée en 1946 à la mémoire de cinq soldats morts au front. Selon le répertoire des biens culturels, seul le sanctuaire est inventorié et il ne bénéficie pas d’une protection légale. Il est qualifié d’exceptionnel par le Conseil du patrimoine religieux.
Son cimetière adjacent, le Mount Hermon, lieu historique du Canada, est séparé de l’ilot par le chemin Saint-Louis. De plus, à cause d’un découpage géographique, il est situé dans le site patrimonial de Sillery alors que l’ilot est à l’extérieur de l’aire protégée.
Les enjeux
La fabrique est aux prises avec de sérieux problèmes financiers et souhaite vendre la salle paroissiale, le presbytère et une partie des terrains. Les acquéreurs potentiels envisagent de développer un projet immobilier tout en conservant la vocation sociale de la salle communautaire. À cet effet, un changement de zonage a été demandé.
Un groupe de citoyens et la Société d’histoire de Sillery (SHS) veulent préserver intégralement les lieux. Ils ont lancé une pétition demandant à la Ville de Québec de refuser la modification de zonage et de faire citer l’église. La pétition, avec 761 noms (environ 6% de la population du quartier), a été présentée au conseil de l’arrondissement.
Une protection patrimoniale incertaine
Dans le passé, la fabrique a tenté, sans succès, d’obtenir une protection juridique de l’église et de la faire inclure dans le site protégé de Sillery. En 1994, la municipalité avait déclaré l’ilot « zone à protéger ». Les lieux se sont donc retrouvés dans un programme particulier d’urbanisme (PPU). Par ailleurs, le PPU ne semble pas avoir été renouvelé à la création de l’arrondissement.
Les points de vue
Selon la fabrique, l’église n’est pas menacée en soi. La demande comprend la construction d’une trentaine de logements, la réparation de la salle communautaire et l’intégration du presbytère dans les nouvelles constructions tout en respectant la volumétrie des bâtiments existants. On veut que le projet soit inclus dans le futur PPU de Sillery.
La Société d’histoire de Sillery s’oppose à toute construction sur le site de l’ilot. Du même souffle, elle se dit prête à échanger avec la fabrique pour trouver une nouvelle vocation au presbytère. Cependant, la SHS a coupé la communication en refusant de discuter avec les instigateurs du projet de développement et en lançant la pétition. Du coup, la fabrique refuse d’engager le dialogue.
Une défense du patrimoine en manque de souplesse
Les arguments de la SHS reposent sur une volonté de préserver l’unité architecturale d’ensemble. Cependant, l’argument est faible puisque près d’un siècle sépare l’érection de l’église et celle de la salle paroissiale. La SHS craint aussi que le site perde de sa valeur patrimoniale et historique. Ces arguments sont également peu fondés puisque seule l’église présente une valeur patrimoniale certaine et celle-ci n’est pas engagée dans le projet. De même, les divers bâtiments se sont construits en plusieurs étapes. Le nouveau projet s’inscrirait donc dans l’histoire du site.
Ce lieu n’est pas protégé par une législation et il s’agit d’un bien privé. Bien qu’ils soient préliminaires, les plans de construction seraient respectueux des bâtiments en usage dans l’ilot. A priori, le projet semble correct et arrimé aux réalités du patrimoine.
Toutefois, pour en assurer le succès, et conserver l’intégrité patrimoniale de l’église, les autorités en place devront effectuer une surveillance rigoureuse des études préliminaires, des plans finaux et de l’exécution du projet.
Laisser un commentaire