MISE À JOUR : Contestation du PPU. Encore des délais pour les domaines de sillery avec une opposition qui s’est radicalisée. L’enjeu est important et, à mon avis, il peut être nuisible au patrimoine à long terme puisque les propriétaires de biens patrimoniaux pourraient être pénalisés. Des acheteurs potentiels hésiteraient à acquérir un bien et à le protéger. Il faudra un jour poser des jalons afin de tempérer la radicalisation des enjeux patrimoniaux.

 Patrimoine paysager
Photo : Pierre Lahoud

Photo : Pierre Lahoud

À  Québec, l’arrondissement historique de Sillery suscite des débats. Les communautés religieuses souhaitent mettre en vente leurs terrains et leurs biens immobiliers excédentaires. Seuls les promoteurs sont prêts à payer la valeur marchande des lots et il veulent profiter des lieux.  Une coalition de citoyens s’est formée en vue d’en empêcher l’exploitation commerciale. Le ministère culture et Communications (MCC) s’en mêle. Quelles sont les limites légales et morales de la loi du patrimoine?

Les lieux

L’arrondissement est situé entre le chemin Saint-Louis et le fleuve. Ce secteur comprend de grands domaines dont plusieurs appartiennent aux communautés religieuses. Environ 10 % de la superficie est construite; le reste est constitué de boisés et d’espaces végétaux.  La valeur patrimoniale des lieux est importante. Elle s’incarne entre autres par son histoire, sa végétation et sa vue imprenable sur le fleuve.

Les domaines en litige sont morcelés en plusieurs lots dont certains sont vendus et d’autres pourraient l’être. Ils appartiennent à quatre communautés religieuses qui ont une vision commune de la situation.

Les points de vue

Les Religieux soulignent qu’ils ont acheté et conservé en bon état les lieux et ce bien avant leur protection patrimoniale légale en 1964. La baisse et le vieillissement de l’effectif font qu’ils n’ont plus les moyens d’entretenir ces grands domaines, ni celui de les céder à des prix moindres. Leur survie immédiate et leur fin de vie en dépendent. Au Québec, les communautés se chargent de tous les couts liés au bien-être de leurs membres. De plus, elles ne bénéficient pas de l’assurance-maladie; elles doivent donc assumer tous leurs frais médicaux qui peuvent s’élever à plusieurs centaines de milliers de dollars annuellement.

Pour ce qui est des lots achetés, le promoteur veut construire 330 appartements. Il a tenu compte du plan de conservation existant au MCC et d’un autre modèle soumis par des citoyens.  Il a cédé 20 % des terrains achetés à la Ville de Québec pour en faire un parc.

L’approche de la coalition de citoyens est puriste. Elle exige que le gouvernement acquière les terrains afin d’en faire un lieu public. De plus, l’intégrité des bâtiments doit être maintenue.

No man’s land

Les boisés sont fréquentés depuis longtemps. De fait, les religieux soulignent que leurs « invités » sont parfois impolis et ne respectent pas les règlements usuels d’un parc public.  Ce qui constituait au départ un privilège s’est transformé en un droit acquis. Le caractère privé des lieux est occulté. La coalition illustre bien cet oubli lorsqu’elle souhaite la création d’un parc afin que le boisé « redevienne » un lieu public (L’Appel, 2 novembre 2012, p. 6). Les citoyens ne veulent pas perdre ce bénéfice conquis.

Expropriation déguisée

Les Religieux ont plusieurs inquiétudes. Des personnes influentes suggèrent que le gouvernement achète les terres. De nombreux exemples démontrent que ces ventes s’effectuent à rabais. Les communautés signalent aussi des cas d’expropriation déguisée. Il en est ainsi lorsque le MCC émet un décret de deux ans qui gèle toute possibilité de développement. Enfin, plus perfide encore, il y a des cas où le ministère impose des normes et des conditions qui font que les groupes restent propriétaires, mais ils ne peuvent plus rien faire avec leur terrain.

Audiences publiques

Le MCC est entré dans la mêlée dernièrement avec des audiences publiques sur le nouveau plan de conservation de l’arrondissement. Ces journées ont rassemblé des groupes d’intérêts et la population. Elles ont mis en lumière des positions irréconciliables. Le ministre devra trancher et user à la fois de souplesse dans les moyens et de fermeté dans les résultats.

La situation de certaines communautés de l’arrondissement est critique et le manque d’argent met en péril leur pérennité.  Comme groupe, peut-on, au nom du patrimoine, s’approprier des biens privés sous quelques formes que ce soit?  Le cas de Sillery illustre une limite éthique entre le droit à l’héritage culturel et celui d’assurer sa survie dans la dignité.

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